Portabilité et prévoyance : les incertitudes perdurent

Rédigé par Margaux VB        Publié le 09/01/2018

Depuis 2015, lorsqu’ils quittent leur poste, les salariés conservent, pendant au maximum 12 mois, le bénéfice des garanties de complémentaire santé et prévoyance en vigueur dans leur ancienne entreprise. Ce dispositif, la portabilité des droits, sécurise le parcours des salariés, mais se heurte, comme nous l’avions craint, à de nombreux cas particuliers. Par exemple, qu’advient-il de la portabilité en cas de liquidation judiciaire ? Puisque le législateur n’a pas prévu directement cette situation, ce sont les juges qui se sont positionnés. En dépit de cette clarification bienvenue, il demeure de nombreuses zones d’ombre. Explications.

La liquidation judiciaire, un des angles morts de la portabilité

La prévoyance couvre des risques rares et chers : décès, invalidité, incapacité, arrêt longue durée… En général, la responsabilité de l’employeur, en matière de prise en charge, est transférée à une compagnie d’assurance ou une institution de prévoyance. La portabilité des salariés ayant quitté l’entreprise est alors assurée par un supplément de cotisations des salariés présents. La mutualisation fait son œuvre.

Lorsqu’un employeur se trouve placé en liquidation judiciaire, les licenciements s’accumulent, et les anciens salariés en situation de portabilité pèsent de plus en plus lourd face aux derniers salariés en poste. Impossible, dans ces conditions, de maintenir des garanties gratuites sans financement adapté. C’est en tout cas la position défendue par les organismes assureurs.

L’avis de la Cour de cassation tranche en faveur du maintien… jusqu’à résiliation

Saisie de la question des droits à portabilité dans le cas d’une liquidation, la Cour de cassation a tranché en faveur du maintien des garanties. Rien ne justifie que les salariés privés de leur emploi dans le cadre d’une liquidation n’aient pas les mêmes droits que les autres. Ceci n’est toutefois valable que tant que le contrat n’est pas résilié. En effet, la loi stipule que les garanties maintenues sont celles « en vigueur dans l’entreprise ». Si les salariés en poste ne sont plus couverts, la portabilité s’éteint d’elle-même.

Une clarification qui réveille d’autres craintes

Prenant l’exemple d’un plan de sauvegarde, l’avis de la Cour de cassation souligne, fort justement, que le même problème peut aussi bien se poser dans une entreprise qui n’est pas en liquidation, mais dont les effectifs ont fondu massivement. Rien de très rassurant dans cet argument ! On aurait tort de penser que les assureurs garderont la patate chaude de la portabilité sans préserver leurs équilibres. Certains contrats d’assurance contiennent, d’ores et déjà, des clauses qui suspendent les garanties dès lors qu’un certain pourcentage de salariés entrent en portabilité. Dans cette éventualité, l’obligation légale continue néanmoins de peser sur les épaules de l’employeur. Une situation peu confortable, qui doit inciter les entreprises à la plus grande vigilance à l’égard de leur contrat de prévoyance. Quant à la Cour de cassation, il y a fort à parier qu’elle n’en a pas fini avec les litiges liés à la portabilité.

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Article écrit par
Margaux Vieillard-Baron

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