L’investissement Socialement Responsable (ISR) : illusion ou réalité

Rédigé par Amadou Kasse        Publié le 22/11/2024

L’investissement socialement responsable (ISR) a le vent en poupe. Les fonds ISR, qui intègrent des critères environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG) dans leurs décisions d’investissement, séduisent un nombre croissant d’investisseurs. Mais derrière cette croissance fulgurante se cachent de nombreuses nuances et interrogations. Ce décryptage propose une analyse approfondie de l’univers ISR, en s’appuyant sur les dernières données et en confrontant les promesses de ce marché aux réalités des placements. 

L’essor fulgurant de l’ISR et du label ISR 

Les chiffres parlent d’eux-mêmes. Les fonds ISR ont connu une croissance spectaculaire ces dernières années, témoignant d’un intérêt grandissant des investisseurs pour des placements durables. Ils ont largement pénétré le marché de l’épargne salariale, aussi appelée épargne verte, offrant aux salariés la possibilité d’investir dans des projets, via des Plans d’Epargne Retraite Collectifs (PERCO) ou desPlans d'Epargnes Retraite Obligatoire (PERO), à impact positif pour la société et pour l’environnement. 

L’émergence de nombreux labels, dont le label ISR, a contribué à structurer le marché et à offrir aux investisseurs une meilleure lecture des offres disponibles.   

En 2023, les encours des 1037 fonds gérés en France disposant d’au moins un label, s’élevaient à 805 milliards€. Parmi ces derniers, 85 % portaient le label ISR, tandis que les labels Greenfin et Finansol représentaient respectivement 2,2 % et 1 % des encours. 

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Le label ISR : levier de performance ou simple argument marketing ?

Une des principales questions qui se pose autour de l’ISR concerne la performance financière. Contrairement à certaines idées reçues, investir dans des fonds labellisés ISR ne signifie pas renoncer à la rentabilité.

L’ISR n’est pas une fin en soi, mais un moyen de favoriser une transformation positive des entreprises. Les fonds ISR investissent dans des entreprises engagées dans une démarche vertueuse, tout en reconnaissant qu’aucune entreprise n’est parfaite.

Quelle performance pour les labels ISR ?

De nombreuses études montrent que la performance des fonds ISR est comparable, voire supérieure, à celle de fonds traditionnels sur le long terme. Ces résultats s’expliquent par la prise en compte de risques ESG, qui peuvent impacter la performance des entreprises.

 

Comparatif des fonds ISR versus non ISR

Performance cumulée brute de l'indice MSCI World SRI [1]de 2009 à 2024

Comparatif-des-fonds-ISR-versus-non-ISR

Quelle réglementation pour clarifier ces labels ISR ?

Cela a notamment poussé les législateurs à sévir face au développement fulgurent de ces fonds. Pour encadrer cette dynamique, ils ont mis en place des initiatives comme la réglementation européenne SFDR (Sustainable Finance Disclosure Regulation). Elle apporte une plus grande transparence sur les produits financiers durables et permet aux investisseurs de mieux comprendre les caractéristiques des fonds ISR.

En 2023, 59 % des encours des fonds et mandats gérés en France étaient classifiés selon les articles 8 ou 9 de cette réglementation, témoignant d’une adoption croissante de l'investissement responsable.

  • Article 8 : inclut les fonds ayant des caractéristiques environnementales ou sociales.
  • Article 9 : regroupe les fonds ayant des objectifs d'investissement durable.

Le label ISR, quant à lui, agit comme un indicateur précieux, bien qu’il ne soit pas exempt de critiques, notamment en matière de greenwashing. Cela a amené le ministère de l’Économie à mettre en place un nouveau cahier des charges soumis aux sociétés de gestion d’actifs qui souhaitent se prévaloir du Label ISR afin de mieux distinguer le bon grain de l’ivraie.

Enjeux et limites du label ISR

L'ISR, bien que séduisant, n'est pas une panacée. Si les fonds ISR offrent une alternative intéressante aux investisseurs soucieux de l'environnement et de la société, leur mise en œuvre soulève plusieurs questions. En effet, la réalité de l'investissement responsable est plus complexe qu'il n'y paraît. Cela est particulièrement vrai dans le cadre de l’épargne salariale, où les salariés, souvent moins avertis que les investisseurs professionnels, peuvent avoir des attentes élevées vis-à-vis des fonds labellisés ISR.

Attention au greenwashing

Malgré les garanties offertes par le label ISR, le risque de greenwashing demeure une préoccupation majeure. Il est essentiel de se méfier des allégations trop belles pour être vraies et de privilégier les fonds dont la politique d’investissement est transparente et rigoureuse.

ISR ne veut pas dire sécurité du placement

Tous les fonds ISR n’ont pas tous la même approche stratégique. Certains excluent les secteurs les plus controversés, tandis que d’autres privilégient le dialogue avec les entreprises pour favoriser le changement. Leur risque est également différent suivant les choix de placement des gérants. Cette diversité rend complexe l’évaluation des risques et des impacts.

Complexité des critères ESG

Les critères ESG sont nombreux et variés, ce qui rend la comparaison des fonds difficile. Il est important de bien comprendre les critères spécifiques de chaque fonds avant d’investir.

Même si les fonds ISR peuvent avoir un impact positif, il ne faut pas surestimer leur pouvoir de transformation. Les défis environnementaux et sociaux sont complexes et nécessitent des actions à tous les niveaux de la société.

Les limites du label ISR

« Les fonds labélisés ISR ne sont pas « verts » dans l’absolu, mais ils sont « plus verts » que les fonds non labélisés ».

Le label ISR, bien qu'il soit un indicateur utile, ne suffit pas à garantir un investissement véritablement durable. En effet, si les fonds labellisés sont en moyenne moins carbonés, une part non négligeable de leurs investissements reste exposée à des risques environnementaux. Le label agit davantage comme un filtre excluant les pires élèves que comme une garantie d'excellence environnementale.

 

Distribution des fonds en fonction de l’intensité2 carbone moyenne de leur portefeuille
Source : Banque de France, ISS.

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Comment intégrer l’ISR dans une stratégie d’investissement ?

L’investissement responsable est un choix personnel qui doit s’inscrire dans une stratégie d’investissement globale. Il est important de bien comprendre ses objectifs et ses contraintes avant de se lancer.

Pour réduire les risques, il est recommandé de diversifier ses investissements en choisissant plusieurs fonds ISR ayant des caractéristiques ou de classes d’actifs différentes. En outre, il existe différents labels permettant de concilier la performance financière et performance sociale et/ou environnementale. Une offre diversifiée doit également inclure un large panel donnant accès à des labels répondant à des objectifs variés

Les investisseurs doivent exiger une transparence maximale de la part des gestionnaires de fonds. Ils doivent avoir accès à des informations claires et précises sur les critères ESG, la méthodologie de sélection des titres et les résultats obtenus.

Enfin, les autorités de régulation doivent continuer à renforcer les exigences en matière de transparence et de lutte contre le greenwashing.

 

Quelles sont les ambitions du nouveau label ISR ?

Le ministère de l’Économie et des Finances a dévoilé fin 2023 une version révisée et plus ambitieuse du label ISR. Ce nouveau référentiel qui est entré en application le 1er mars 2024 vise à répondre aux attentes croissantes des épargnants et aux défis environnementaux actuels, en particulier la lutte contre le changement climatique.

Le nouveau référentiel ISR apporte des évolutions notables :

  1. Exclusion des énergies fossiles : Le nouveau label exclut désormais les entreprises exploitant du charbon ou des hydrocarbures non conventionnels, ainsi que celles impliquées dans de nouveaux projets d’exploration, d’exploitation ou de raffinage d’hydrocarbures.​
  2. Stratégies de transition : Les sociétés de gestion devront analyser et mettre en œuvre des stratégies de transition pour les entreprises en portefeuille, alignées sur l’accord de Paris. ​ Dès 2026, 15% des portefeuilles investis dans des secteurs à fort impact devront disposer de plans de transition conformes à cet accord, avec un engagement pour que 20% supplémentaires suivent dans les trois ans.
  3. Renforcement des critères ESG : Le label renforce la sélectivité en excluant désormais les 30% des entreprises les moins bien notées sur les critères ESG, contre 20% auparavant. Une transparence accrue sur la pondération des critères environnementaux, sociaux et de gouvernance sera également introduite.
  4. Ambition climatique et généraliste : Tout en mettant l’accent sur le climat, le label conserve son caractère généraliste avec une sélectivité renforcée sur les autres critères ESG. Les sociétés de gestion devront limiter les incidences négatives de leurs investissements.

Perspectives pour l’ISR et le label ISR

L’ISR offre une opportunité unique pour les investisseurs et donc pour les entreprises de concilier performance financière et impact positif. Cependant, il est essentiel d’aborder ce marché avec un regard critique et de ne pas se laisser séduire par les seules promesses. En adoptant une approche éclairée et en choisissant des fonds rigoureusement sélectionnés, les investisseurs peuvent contribuer à façonner un avenir plus durable.

Vous pouvez également faire appel à nos experts pour vous éclairer sur la pertinence de la gestion financière de vos dispositifs d’épargne salariale et épargne retraite

En tant qu’entreprise à mission, ces enjeux sont intégrés à notre démarche et grâce à notre référentiel ESG (Environnement, Social, Gouvernance), nous permettons à chaque client de choisir un assureur qui correspond aux valeurs et aux sensibilités de leurs salariés.

 

[1] L'indice MSCI World SRI sélectionne les meilleures entreprises mondiales en termes de critères ESG, excluant celles ayant un impact négatif. Il offre aux investisseurs une exposition à un panier d'actions diversifié géographiquement et responsable.

[2]L'intensité carbone est définie comme les émissions de dioxyde de carbone par unité d'énergie. Le score mesure les émissions de gaz à effet de serre associées à la production, la distribution et la consommation d'un carburant

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Article écrit par
Amadou Kasse

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