Coup d’accélérateur sur l’intéressement ?

Rédigé par Margaux VB        Publié le 24/04/2018

Au détour d’une conversation avec Jean-Pierre Pernaut, présentateur emblématique du journal télévisé de 13h de TF1, le Président de la République s’est fendu d’une annonce choc sur l’intéressement : la suppression pure et simple du forfait social pour les entreprises de moins de 250 salariés, à compter de 2019. La mesure, intégrée à la future loi Pacte, constituera un vrai coup de pouce à ce dispositif qui avait tendance, réforme après réforme, à perdre de son intérêt et de son sens. Des questions restent toutefois en suspens.

Une annonce qui met fin à l’étouffement progressif de l’intéressement

Entre 2000 et 2007, l’épargne salariale a connu une croissance de 79 %. Mais son élan s’est brisé : les montants distribués aux salariés se sont mis à stagner, oscillant entre 14 et 17 milliards d’euros par an. À l’origine de cette rupture : le forfait social. Créée en 2008 et initialement établie à 2 %, cette contribution s’est rapidement envolée passant, année après année, à 4 %, 6 %, 8 % puis 20 % en 2012. Le forfait social s’ajoutant aux CSG et CRDS, les primes d’intéressement devenaient alors plus lourdement taxées que les bas salaires. En 2015, la loi Macron tentait timidement d’encourager le développement de l’intéressement, en réduisant le forfait social à 8 % pour les entreprises de moins de 50 salariés qui signaient un premier accord. Toutefois, cet effort, modeste, laissait les entreprises pionnières aux prises avec leur taxation exorbitante, pour ne récompenser que les nouveaux venus. La suppression totale du forfait social pour l’ensemble des sommes versées au titre de l’intéressement par les entreprises de moins de 250 salariés est donc une mesure plus juste, d’une ampleur inédite, et de nature à créer un véritable déclic en faveur du développement de l’intéressement.   

Des questions en suspens

L’intéressement, invention gaullienne de 1959, n’est pas une prime comme les autres. Il ne rémunère pas un travail individuel, mais plutôt une performance collective dans l’entreprise. Favoriser l’intéressement, c’est donc d’un même mouvement donner un coup de pouce à l’épargne des salariés, et les associer symboliquement et financièrement à la création de richesse de l’entreprise. Or, seul un salarié français sur trois y a accès. Une proportion qui tombe aux alentours de 10 % dans les entreprises de moins de 50 salariés. La mesure vise donc à étendre le bénéfice de ce dispositif à un plus grand nombre de salariés. D’autre part, on peut déplorer l’apparition d’un nouveau seuil à 250 salariés, mais il faudra s’en contenter car le coût de la mesure – déjà un demi-milliard d’euros en l’état – rendait sans doute impossible la suppression pure et simple du forfait social. Par ailleurs, la suppression de cette contribution ne lève pas tous les points de blocage qui pénalisent le développement de l’intéressement. Par exemple, certains patrons de PME rechignent à présenter, en toute transparence, à leurs salariés les résultats de leur entreprise. Pour répondre à ce souci de confidentialité, Fondact proposait ainsi que les calculs de l’intéressement puissent être vérifiés et validés par un expert comptable, indépendant, plutôt que par des représentants du personnel. Enfin, la procédure qui mène à un accord d’intéressement conserve une certaine complexité, rédhibitoire pour les petites entreprises. Si le Président de la République a dévoilé une des mesures fortes de la Loi Pacte, il faudra rester attentif aux autres mesures de simplification qui accompagneront la suppression du forfait social. Ce sont ces détails qui feront de la Loi Pacte un coup d’accélérateur pour l’intéressement ou un coup d’épée dans l’eau. 

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Article écrit par
Margaux Vieillard-Baron

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