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La généralisation de la complémentaire santé et la mise en concurrence des organismes d’assurance maladie complémentaires ont eu pour conséquence immédiate une baisse des tarifs avec un maintien des prestations. C’est ce que révèle une étude menée par Gerep sur la période de 2015 à 2021, à partir de la base de données Tripalio. À l’heure où, étrangement, des rapports suggèrent de mettre un terme à la libre concurrence pour réduire le coût de la santé et rendre du pouvoir d’achat aux assurés, il est bon de rappeler certaines évidences.
Objectif : analyser les effets de l’ouverture à la concurrence en 2015
Rappel historique… En juin 2013, le Conseil Constitutionnel a censuré le système qui ordonnait la désignation d’un assureur unique pour une branche professionnelle et l’ensemble de ses entreprises affiliées. L’objectif était simple et clair : il s’agissait de rendre la liberté de choix aux entreprises.
Alors que les adversaires de la libre concurrence ne désarment toujours pas, nous nous sommes efforcés d’estimer les conséquences sur les tarifs de la fin de ces clauses de désignation. La tâche est ardue. Et il convient d’analyser avec prudence les résultats de notre étude. Celle-ci n’est pas exhaustive : elle porte sur les 12 millions de salariés appartenant aux branches dont l’Insee publie les effectifs. Ensuite, la notion de tarif est complexe : elle revient à mélanger des choux et des carottes, en mêlant, par exemple, des contrats qui concernent le salarié seul ou sa famille, et en ignorant les différences ou les évolutions des garanties. Par ailleurs, à partir d’un certain nombre de salariés, les acteurs de l‘assurance santé complémentaire ont tendance à adapter les tarifs à la sinistralité propre à l’entreprise.
Une baisse notable des tarifs entre 2015 et 2016
La méthode objective et constante de l’étude permet toutefois de dégager des tendances spectaculaires. Sur notre échantillon, l’ouverture à la concurrence entre 2015 à 2016 fait l’effet d’un trou d’air à la baisse sur les tarifs. Nos calculs révèlent une chute de la cotisation mensuelle moyenne, de 54 à 48 euros sur cette seule année charnière, soit 72 euros par salarié et par an. Sur les dernières années, les chiffres oscillent entre 49 et 50 euros de cotisation moyenne mensuelle. C’est-à-dire que les contrats ont repris leur cours, en intégrant la tendance inflationniste des dépenses de santé, mais sans rebondir ni compenser brutalement le gain immédiat lié à la mise en concurrence. Une extrapolation, par nature un peu hasardeuse, nous permet donc d’estimer à près d’un milliard d’euros, le gain annuel pour les salariés de notre échantillon. Ainsi, sur la période 2015 à 2021, ce seraient près de 5 milliards d’euros de pouvoir d’achat qui auraient été restitués, alors que sur la même période la consommation de soins et de biens médicaux a augmenté de 10%.
Une évidence : la libre concurrence fait baisser les prix de l’assurance maladie complémentaire
Dans un contexte de croissance des dépenses de santé et d’amélioration des garanties – notamment du fait de la réforme du 100% santé – les acteurs de l’assurance maladie complémentaire se sont efforcés de maîtriser la hausse des tarifs. En effet, la concurrence ne laisse à aucun acteur privé le luxe de s’octroyer des marges de sécurité sur le dos de ses clients, même dans les contextes les plus incertains. Est-ce que ce serait le cas avec un marché captif ?
Aujourd’hui, des voix s’élèvent pour remettre en question les bienfaits de la concurrence sur la protection sociale complémentaire. Dans ses propositions, le rapport du HCAAM (Haut conseil pour l’avenir de l’Assurance maladie) évoque même la piste d’une réduction de la concurrence par la création d’une grande sécurité sociale monopolistique et exclusive de tout autre assureur. Face à cela, notre étude n’a qu’un seul but : établir, sur la base d’un évènement précis, que le développement de la libre concurrence dans le domaine de la complémentaire santé a bien eu des effets positifs sur le pouvoir d’achat des assurés. Une évidence, certes, mais qu’il semble nécessaire, par les temps qui courent, de rabâcher encore et encore.
Article écrit par
Damien Vieillard-Baron